Un résultat remarquable
Les correspondants ont renvoyé au bureau du Glossaire près d’un million et demi de fiches. Malgré cela, les fondateurs ont bien conscience que l’intégralité du vocabulaire romand ne s’y trouve pas. Des mots rares ou utilisés dans des contextes particuliers ont forcément été oubliés. De même, certains patois sont moins représentés que d’autres, faute de correspondant. Mais grâce à la méthode employée, le bilan s’avère malgré tout positif : une fois toute la documentation rassemblée, rien de vraiment important ne manque.
Des réponses plus variées que prévu
Dans son projet de 1897, Louis Gauchat avait imaginé la manière dont se déroulerait l’analyse des matériaux. Il avait prévu que les réponses à un même questionnaire reviendraient en même temps au bureau du Glossaire et qu’elles pourraient donc être comparées. Cette méthode devait permettre d’identifier facilement les formes douteuses et les lacunes dans les réponses fournies. Il aurait alors suffi de s’adresser directement aux correspondants pour clarifier les points problématiques ou d’aller sur place pour contrôler les matériaux. Malheureusement, les réponses aux questionnaires ne sont pas revenues au Glossaire comme souhaité, arrivant souvent dans le désordre. Beaucoup de mots sont problématiques et les vérifications effectuées ne viennent pas toujours à bout des difficultés. Sans compter que les patois reculent rapidement et que le temps manque pour aller sur le terrain contrôler ce qui devrait l’être. Le plan initial tombe donc à l’eau, surtout qu’il faut sérieusement penser à classer les réponses.
Un classement titanesque
Les fiches sont donc là, innombrables. Il est temps de passer à l’étape cruciale : leur classement. Il est évident pour les fondateurs que rien ne pourra être publié avant d’avoir terminé ce travail. Le risque serait trop grand d’oublier des informations nécessaires. Grâce au système d’enquête par questionnaires, les réponses reçues, rassemblées dans des carnets à souche, sont groupées par thématique et par localité. Mais pour faire le dictionnaire, il faut adopter un ordre purement alphabétique. Avec l’aide de leurs auxiliaires, les fondateurs commencent donc par défaire les carnets de fiches. Ils les réunissent par mots identiques et les insèrent dans des enveloppes de classement. Puis ils rangent ces enveloppes par ordre alphabétique dans des boîtes à chaussures. Ce travail qu’ils décrivent eux-mêmes comme ingrat les occupera pendant ces treize années.